Liberté économique et qualité de vie

Une petite vidéo très bien faite de la Charles G. Koch Foundation.



Via Café Hayek.

Démondialisation à Gaza

Les promoteurs de la « démondialisation » estiment qu’un retour des barrières douanières serait de nature à améliorer le bien-être des français ; étrangement, les mêmes politiciens ne semblent pas penser que le blocus de gaza ait amélioré le bien-être des gazaouis…

(Note: Don Boudreaux fait régulièrement le même constat pour Cuba...)

2000 ans en 1 graphique

Selon The Economist sur la base de données d'Angus Maddison et des Nations Unies, plus de 23% des biens et services produits depuis l'an 1 l'ont été entre 2001 et 2010.


Via Carpe Diem de Mark J Perry.

Pourquoi l’iPad est-il plus cher en France ?

Sur l’Apple Store français, un iPad 2 WiFi 16 Go coûte €489 TTC (€408.86 HT avec une TVA à 19.6%) ce qui, aux cours actuels du dollar, est nettement plus cher que les $499 HT proposés sur l’Apple Store étasunien. La parité EUR/USD implicite (1.22) correspond en gros aux cours d'il y a un an... ceci explique probablement cela.

Mais là où ça devient plus intéressant, c’est quand on compare le prix de l’iPad 2 WiFi 16 Go en France avec les prix pratiqués par le même Apple Store dans d’autres pays de la zone Euro.

Pays-Bas (TVA = 19%) €479 TTC
Irlande (TVA = 21%) €479 TTC
Espagne (TVA = 18%) €479 TTC
Italie (TVA = 20%) €479 TTC
Allemagne (TVA = 19%) €479 TTC
Finlande (TVA = 23%) €479 TTC
Autriche (TVA = 20%) €479 TTC
Portugal (TVA = 23%) €479 TTC
France (TVA = 19.6%) 489 TTC

Question : pourquoi ?

(NB : c’est vraiment une question ; je n'ai pas la réponse...)

--- Addendum le 29/06/2011 à 08 :10

Et la réponse nous est donnée par Aymeric Pontier :

« La raison, c'est la taxe pour la copie privée qui frappe tous les supports de stockage en France, et qui pour l'IPAD correspond à 2% du total. L'IPAD a été rajouté à la liste le 1er février dernier. »

Une taxe. Encore une…

Qui exploite qui ?

Quand la bise fût venue, la cigale se trouva fort dépourvue. Après avoir dansé et chanté tout l’été, elle a maintenant froid et faim ; elle a besoin d’un toit et de vivres pour traverser l’hiver. Pendant ce temps, la fourmi travailleuse et prévoyante qui a passé la belle saison à s’assurer qu’elle ne manquerait de rien, profite des fruits de son travail. On ne peut, bien sûr, pas exclure que la fourmi soit bonne fille et que, sincèrement touchée par les déconvenues de la cigale, elle décide de lui venir charitablement en secours. Il est aussi possible que la cigale, réalisant les conséquences de son insouciance estivale, décide de proposer ses services à la fourmi en l’échange d’une place au chaud et de quelques nourritures. La cigale et la fourmi feraient alors un marché, un échange de bons procédés mutuellement bénéfique dans lequel –certes – la fourmi dispose d’un pouvoir de négociation non négligeable mais vous conviendrez avec moi qu’elle l’a bien mérité : après tout, les réserves qui permettront à nos deux protagonistes de survivre durant l’hiver, c’est elle et elle seule qui les a patiemment emmagasinées.

Je ne vous apprendrais rien en vous disant que ce n’est pas comme ça que fonctionne notre société.

Dans notre société, le fait que la fourmi ait éventuellement pu mériter les richesses qu’elle a accumulé durant l’été n’a aucune espèce d’importance ; à vrai dire on la soupçonne même d’avoir constitué ses réserves aux dépends des autres et notamment de la cigale. En revanche, la cigale a des besoins : peu importe qu’elle n’ait rien produit de l’été, ses besoins lui donnent des droits et en l’espèce, des droits sur les réserves de la fourmi. C’est ce que le gouvernement élu par une majorité de cigales appelle de la « solidarité » : la fourmi doit, sous peine de lourdes sanctions, donner aux cigales de quoi traverser l’hiver.

Si la cigale avait dû travailler dur pour échanger le fruit de son travail contre une partie des vivres de la fourmi, il y a fort à parier que dès l’été suivant, elle aurait, elle aussi, mit en œuvre les moyens nécessaires à assurer son avenir. Si, au moins, la cigale avait bénéficié de la charité de la fourmi, elle lui en aurait été reconnaissante et – ne serait-ce que par fierté – aurait fait en sorte de ne pas faire appel à sa bienfaitrice une seconde fois. Mais dans cette société où la redistribution des richesses de ceux qui les produisent vers ceux qui en ont besoin est devenue une norme morale, la cigale ne voit aucun intérêt à se tuer à la tâche et n’éprouve aucune forme de reconnaissance envers la fourmi ; à vrai dire, elle estime même que la fourmi devrait lui reverser une plus grande partie de son stock.

C’est peut être le travers le plus abject de la société du besoin. La fourmi, qui ne réclame rien à personne mais produit les richesses qui permettent à tous de vivre est coupable : l’énergie qu’elle consacre à améliorer les conditions de son existence est considérée comme la marque de sa cupidité, de son égoïsme et on va même jusqu’à lui reprocher de s’enrichir aux dépends des autres. A l’opposé, la cigale, qui ne produit rien mais réclame parce qu’elle a des besoins, passe pour une victime et fait l’objet de la considération de tous : son détachement des choses bassement matérielles, sa vie consacrée à son art et l’élévation de son âme en font un personnage remarquable. La fourmi est immorale ; la cigale est parée des plus hautes vertus. Il s’en suit qu’une cigale qui se met au travail pour améliorer ses conditions d’existence commet un acte immoral et qu’une fourmi qui décide de devenir cigale en vivant aux dépends des autres se comporte de manière vertueuse.

Ainsi vont les choses : les fourmis triment, les cigales réclament leur dû, le gouvernement qui aime entendre les cigales chanter ses louanges taxe les fourmis et redistribue le produit du butin aux cigales. Les fourmis, pour sauver leur peau ou par découragement, fuient ou cessent de travailler tandis que la population des cigales et son poids électoral grandissent jour après jour. Et ainsi de suite… L’histoire se termine quand toutes les fourmis ont disparu et quand seules restent des cigales affamées et incapables de subvenir à leurs propres besoins qui reprochent au gouvernement de ne plus avoir les moyens de les nourrir.

Qui a besoin de qui ? Qui vit aux dépends de qui ? Qui exploite qui ?

Les voies de l'intérêt général sont impénétrables

Une entreprise française, constatant que le prix de marché du travail en Roumanie est inférieur celui qui a cour en France, décide de délocaliser une partie de sa production dans la région de Bucarest. On est donc bien dans une situation où la décision de cette entreprise – qui n’est, cela va de soit, motivée par rien d’autre que la volonté de maximiser ses profits – provoque une baisse de l’offre d’emplois en France et une augmentation en Roumanie. En supposant que la demande est constante et que le marché du travail n’est pas régulé, nous devrions donc assister à une hausse des salaires en Roumanie et à une stagnation ou même une baisse en France [1]. En d’autres termes, guidée par une sorte de main invisible, cette entreprise participe à une réduction des inégalités de revenus entre la France et la Roumanie. Imaginons un instant que l’Etat français s’oppose à cette décision et menace l’entreprise de lourdes sanctions fiscales en cas de délocalisation : le résultat de cette politique sera un maintient des inégalités de revenus entre roumains et français. Le marché tend à réduire les inégalités salariales ; le restreindre contribue à les faire perdurer.

Dans les rangs « progressistes » cette simple déduction de bon sens peut donner lieu à deux types de réactions : la dénégation pure et simple ou l’affirmation du principe selon lequel l’objectif de réduction des inégalités ne s’entend qu’à l’intérieur de frontières politiques données. En d’autres termes, si les roumains sont pauvres c’est leur problème ; qu’ils se débrouillent : les français d’abord [2].

Mais les choses peuvent devenir beaucoup moins nettes quand le même phénomène se manifeste au beau milieu du cadre rassurant de frontières politiques solidement gardées comme en témoigne les mésaventures de l’avionneur Boeing [3]. En effet, la firme de Chicago a jugé bon d’investir 750 millions de dollars dans la construction d’une usine en Caroline du Sud plutôt que dans l’Etat de Washington, là où la plupart de ses appareils sont assemblés. La direction n’a fait aucun mystère sur les raisons de ce choix : le coût de la main d’œuvre est tout simplement moins élevé en Caroline du Sud. Or voilà que le National Labor Relations Board (NLRB) attaque Boeing en justice au motif que cette délocalisation interne aux Etats-Unis violerait les droits des syndicats de l’Etat de Washington en les exposant à la concurrence forcément déloyale des travailleurs de Caroline du Sud.

Evidemment, les « progressistes » de Seattle se félicitent de cette décision qui va, de toute évidence, dans le sens de l’intérêt général tandis que ceux de Columbia s’en offusquent au motif que, bien évidemment, le même intérêt général commandait à Boeing de s’installer dans leur Etat. Les voies de l’intérêt général sont impénétrables.

La réalité disait Philip K Dick s’est ce qui ne disparait pas quand on cesse d’y croire. En l’espèce, laisser Boeing installer ses sites de production où son intérêt lui indique de le faire était de nature à réduire les disparités salariales entre l’Etat de Washington et la Caroline du Sud ; l’en empêcher, c’est favoriser le maintien de ces inégalités. De retour en France et après 4 décennies de social-démocratie redistributive et de réglementation du marché du travail, les mêmes « progressistes » dénoncent jour après jour la « croissance des inégalités » et nous proposent une solution originale pour régler le problème : plus de redistribution et plus de règlementation.

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[1] Mais comme le marché du travail français est lourdement régulé, on assistera dans les faits à une augmentation du chômage.
[2] D’où certaines convergences qu’on a cru, longtemps et à tort, contre natures.
[3] Qui n’est pourtant pas le dernier à chercher la protection des politiciens au nom de l’intérêt général du peuple étasunien.

Hypocrisie

L’excellent Robin Hanson propose un paradoxe très instructif.

Imaginez qu’un sondage, réalisé auprès d’un échantillon représentatif de jeunes bachelier fraichement diplômés, demande aux sondés s’ils seraient favorables à une redistribution de leurs points de telle sorte que ceux qui ont obtenu les meilleures moyennes abandonnent un certain nombre de point à ceux qui ont obtenu les plus mauvais résultats. Par exemple, l’élève brillant qui a obtenu une moyenne de 17 sur 20 devrait céder 6 de ses points et n’obtiendrait donc finalement qu’une note de 11 sur 20 et, a contrario, l’étudiant médiocre dont la moyenne n’atteint que 3 sur 20 recevrait une aide de 7 points, lui permettant ainsi d’avoir la moyenne.

La plupart des étudiants interrogés seraient sans doute défavorables à cette idée au motif qu’elle serait « injuste » vis-à-vis des lycéens les plus travailleurs : les notes de ces derniers reflètent leurs capacités innées et leurs mérites et il ne serait pas moral de les pénaliser au profit d’élèves moins doués et surtout moins assidus. Un tel système de redistribution ne ferait que décourager les élèves brillants tout en confortant les cancres dans leur paresse et, à terme, dégraderait considérablement la capacité de notre système scolaire à produire des jeunes diplômés compétents et travailleurs ; c’est toute la société qui finirait par en pâtir.

Pourtant, si vous deviez demander au même échantillon d’élèves ce qu’ils pensent d’une redistribution des revenus – où les « riches » reversent une partie de leur revenus aux « pauvres » – il est très vraisemblable qu’une large majorité y sera favorable au motif, précisément, que ce serait « juste » vis-à-vis des moins fortunés.

Le plus intéressant, dans ce petit exercice, c’est de demander à nos bacheliers de justifier cette contradiction. Pourquoi est-il « injuste » de procéder à une redistribution des notes alors qu’il est « juste » de redistribuer les revenus ?

Faites confiance aux politiciens

Pour mémoire, une des propositions phares du candidat Nicolas Sarkozy en 2007.

(cliquez pour profiter d'une meilleure définition)

Piketty a menti

Un rapport de l’iFRAP daté du 24 mai 2011 démontre que Thomas Piketty, l’auteur de « pour une révolution fiscale » et le promoteur du site revolution-fiscale.fr, a truqué ses chiffres ou – plus précisément – la présentation qui en a été faite.

Via : Aymeric Pontier que je salue au passage.

Libération fiscale le 26 juillet 2011

L’Institut Economique Molinari (IEM) viennent de publier une étude visant à comparer le poids de la fiscalité pour les salariés des 27 pays de l’Union Européenne. En moyenne, c’est près de 44% du salaire des individus qui travaillent au sein de l’UE qui sera socialisé en 2011 (charges sociales « patronales », charges sociales « salariales », impôt sur le revenu et TVA).

Avec un taux d’imposition réel de 56.36%, la France arrive troisième du classement après la Belgique (58.83%) et la Hongrie (57.28%). Le jour de libération sociale et fiscale du salarié français moyen aura donc lieu cette année le 26 juillet. En termes de pouvoir d’achat, cela signifie que pour qu’un salarié français puisse disposer librement d’un euro, son employeur doit lui verser 2.3 euros. Par ailleurs, nous détenons le record européen des charges sociales avec un taux record de 66% du brut qui en dit long sur le coût réel de notre système de protection sociale.

Pour mémoire, quand votre employeur débourse 48 492 pour vous payer, 16 079 euros partent en charges sociales « patronales », 5 301 euros sont prélevés sur votre salaire au titre des charges sociales « salariales », vous paierez 4 508 euros d’impôt sur le revenu et quelque chose de l’ordre de 1 440 euros de TVA. Il vous reste donc 21 164 euros.

Nelly Kaprièlian est une imbécile



Verbatim: « DSK qui est un homme de gauche, s'est fait choper en ayant un comportement d'ultra-libéral sans foi ni loi de droite. »

Comment est-il seulement possible de dire autant d’imbécilités en une seule phrase ? Comment est-il possible de dire ça sans que personne ne réagisse ?

Bonheur totalitaire

C’est décidément très à la mode : les indicateurs économiques n’ayant pas le bon goût de nous montrer ce que nous souhaiterions qu’ils nous montrent – en l’espèce que tout vas de mal en pis et que cette affreuse mondialisation sauvage transforme la planète en champs de bataille mortifère – les technocrates qui nous gouvernent n’ont de cesse que de nous fournir des indices du bonheur national tous plus douteux les uns que les autres. Mais là, nous venons d’atteindre un sommet qui sera, je pense, difficile à surpasser : après l’indicateur du bien-être lancé par l’OCDE c’est au tour de la Corée du nord de nous révéler son indice du bonheur et le classement mondial qui l’accompagne [1].

Publiés récemment par la télévision d’Etat nord coréenne (Chosun Central Television), les résultats indiquent que la Chine, avec un score de 100 sur 100, est le loin le pays où l’on est le plus heureux en ce bas monde puisqu’on y a déjà atteint le bonheur parfait. En seconde position, à tout seigneur tout honneur, la Corée du Nord obtient 98 points ; on imagine volontiers que les deux petits points perdus sont liés à quelques inconvénients mineurs comme les famines, l’absence totale de libertés civiles ou encore les quelques 200 000 prisonniers politiques enfermés dans des camps de concentrations [1]. Suivent ensuite quelques paradis notoires comme Cuba (93/100), l’Iran (88/100) et – bien sûr – le Venezuela (85/100) tandis que, loin derrière, on retrouve naturellement la Corée du sud (18/100) à la 152ème place du classement tandis que les Etats-Unis (rebaptisés pour l’occasion l’« Empire Américain ») finissent bons derniers avec seulement 3 points.

Pyongyang n’a pas révélé la technique de calcul de son indice mais a fait beaucoup plus que ça puisqu’au-delà des détails de cuisine interne, l’annonce de ces résultats expose toute la philosophie du bonheur totalitaire : les gens sont heureux quand l’Etat a dit qu’ils l’étaient.

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[1] Extrait sur Shanghaiist
[2] Selon Amnesty International.

Note de service

Juste un petit mot pour remercier les lecteurs, commentateurs et membres de ce blog (qu’ils soient mes frères d’arme – Fabien, bubulle, Benjamin Franklin, Louis, Mateo, le « Diable probablement », Théo2toulouse, DT – ou qu’ils aient basculé du coté obscur de la force) ainsi que tout ceux et celles qui me font l’insigne honneur de relayer mes modestes contributions à notre cause sur leurs blogs, sur Twitter, sur Facebook et ailleurs.

Quizz :
Qui a fait le serment suivant ?
« Je jure sur ma vie, et sur mon amour pour elle, que je ne vivrai jamais pour le service d’un autre homme, ni ne demanderai à un autre homme, de vivre pour la mienne. »

Je serais très heureux de correspondre par mail avec celles et ceux qui connaissent la réponse.
georges [point] n [point] kaplan [at] gmail [pointcom]

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Addendum: si vous connaissez la réponse, merci de ne pas la donner aux autres dans les commentaires....

Les imbéciles au travail

Dans notre série « l’Etat doit intervenir pour sauver l’emploi industriel », section « soutenons le secteur automobile », il semble que les effets obtenus ne soient pas exactement ceux qui étaient recherchés.

« Très belle année 2010 pour Philippe Varin ! Le président du directoire de PSA a quasiment triplé sa rémunération, à 3,25 millions d'euros. Sa part fixe est restée la même qu'en 2009, soit 1,3 million d'euros. Il a, de plus, perçu une coquette part variable de 1,65 million. Et l'heureux patron a reçu, en outre, une gratification exceptionnelle de 300.000 euros! Arrivé à mi-année, Philippe Varin n'avait perçu réellement que 777.830 euros sur l'année 2009. » (la Tribune)

Merci qui ?

La « démondialisation », retour vers le passé

Dans ses commentaires sur le livre-programme à deux euro d’Arnaud Montebourg, Daoud Boughezala affirme que le « dernier bastion des défenseurs de la mondialisation » serait constitué, d’après « les sondages », par les « élites mondialisées ». Je m’inscris en faux contre cette allégation. Je ne fais moi-même pas partie de ces fameuses élites mondialisées et pourtant il se trouve que je suis un fervent défenseur de la mondialisation et du libre-échange. Démonstration.

L’idée selon laquelle la mondialisation « désindustrialise » la France est un mythe qui n’a d’existence que dans le discours politique. Si le poids de l’industrie recule dans notre économie – la part de l’industrie passe de 22% du PIB en 1970 à 11% en 2010 –, ce n’est pas du à une baisse de notre production industrielle – elle n’a jamais été aussi élevée que ces dernières années [1] – mais à une croissance plus rapide des activités de services. Si messieurs Montebourg et Boughezala pensent que la mondialisation est à l’origine de ce phénomène, il va falloir qu’ils nous expliquent comment il peut être mondial : la part de l’industrie dans le Produit Mondial Brut est passée de près de 27% en 1970 à moins de 17% de nos jours ; en Allemagne, elle est passée sur la même période de 32% du PIB à 17% [2]. Serions-nous victimes de la concurrence déloyale d’une civilisation extraterrestre ? Nos chantres du protectionnisme mettent-ils aussi la mondialisation en cause dans la réduction du poids de l’agriculture dans notre économie ? Combien d’exploitations agricoles ont-elles été délocalisées en Chine ces dernières années ?

Ce que messieurs Montebourg et Boughezala appellent la « désindustrialisation » est, pour l’essentiel, la conséquence de deux phénomènes : l’externalisation de certains métiers – typiquement le nettoyage des sites de production – qui étaient autrefois comptés comme des emplois industriels et qui sont aujourd’hui comptabilisés dans les « services aux entreprises » mais surtout le progrès technologique. Le fait est que les gains de productivité réalisés dans nos industrie comme dans notre agriculture font que « fabriquer des choses » est devenu une activité à faible valeur ajoutée qui utilise infiniment moins de main d’œuvre qu’il y a 20, 30 ou 50 ans. En d’autres termes, la valeur réelle des biens industriels baisse et c’est précisément ce qui permet à nos concitoyens – et à commencer par les moins fortunés – de disposer d’un pouvoir d’achat plus élevé qu’il ne l’a jamais été dans l’histoire [3].

Pour nous « protéger » de cette « désindustrialisation », on vous propose de mettre en place des politiques protectionnistes. Dans la pratique, pour ceux à qui ça aurait échappé, ça signifie que l’Etat va taxer les produits d’importation afin de pénaliser les entreprises étrangères qui ont le culot de nous vendre des produits bon marché et donc de favoriser les entreprises françaises qui nous vendent des produits plus onéreux. S’il y a une conséquence certaine d’une politique protectionniste c’est que les prix des produits que vous consommez vont monter – soit qu’ils sont importés et donc taxés, soit qu’ils sont produit en France mais ne sont plus contraints par la concurrence étrangère. Cette politique, c’est vous qui la paierez et vous la paierez que vous soyez riche à millions ou pauvre comme Job par une baisse de votre pouvoir d’achat.

Mais, me diriez vous, « ça va créer des emplois en France ! ». Alors voila le plan : en taxant – par exemple – les produits textiles importés, les industriels qui souhaitent nous vendre des chemises viendront relocaliser leur production en France et embaucherons une main d’œuvre française. N’ayant plus à craindre la « concurrence déloyale » des chinois, tunisiens et autres turcs, ils vendront leurs chemises plus cher et comme nous ne sommes absolument pas sensibles au prix des choses que nous achetons, nous consommerons autant de chemises qu’avant. A moins, bien sûr, que nous – et particulièrement les moins riches d’entre nous – ne soient tout à fait sensibles au prix des chemises auquel cas, nous en achèterions moins et cette production nouvellement relocalisée ne serait qu’une fraction de ce que nous importons aujourd’hui… N’est-ce pas ?

Ce que nos apprentis sorciers semblent négliger c’est qu’une partie considérable des biens et services que nous consommons aujourd’hui ne nous sont devenus accessible que grâce à la mondialisation. Fermez les frontières et la production de ces biens ne sera pas relocalisée en France mais elle disparaîtra purement et simplement pour la simple et bonne raison que personne n’aura les moyens de se payer ces produits. Avec les chemises bon marché produites en Chine, nous assisterons donc aussi à la disparition des métiers qu’elles ont créés chez nous : transporteurs, stylistes, vendeuses en boutique… j’en passe. Rajoutez à ça les contremesures inévitables qui seront mises en place par le gouvernement chinois et ce sont des entreprises comme L’Oréal, Legrand et nos producteurs de Cognac [4] qui iront rejoindre les reste de notre économie par le fond.

Finalement, Daoud Boughezala reproche à Arnaud Montebourg de se raccrocher « à l’illusion d’un intérêt général européen ». C'est-à-dire que Montebourg pense qu’il existe une définition de l’intérêt général des européens qui est en contradiction avec celui des non-européens tandis que Boughezala lui oppose qu’il existe un intérêt général des français qui n’est pas compatible avec celui des non-français. Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? N’existe-t-il pas un intérêt général des provençaux qui est en contradiction avec celui des non- provençaux ? Et quid de l’intérêt général des marseillais ? Est-il compatible avec celui des non-marseillais ? Et puisque nous y sommes, pourquoi l’intérêt général des habitants du panier [5] irait-il de paire avec celui des habitants des autres quartiers de Marseille ? Messieurs Montebourg et Boughezala pourraient-ils me dire au nom de quoi l’intérêt général de ma petite famille serait compatible avec celui de ceux qui n’en font pas partie ?

Eh bien non, ils ne peuvent pas. Ils en sont incapables pour la bonne et simple raison qu’admettre que mon intérêt personnel n’est en aucune manière en contradiction avec celui de mes voisins revient, par simple extension, à admettre qu’il n’est pas non plus en contradiction avec celui d’un ouvrier chinois ou d’un agriculteur péruvien. L’idée selon laquelle il existerait, à quelque échelle que ce soit, une définition de l’« intérêt général » qui soit incompatible avec nos intérêts individuels et qui justifierait, dès lors, que messieurs Montebourg et Boughezala fassent usage de la force pour nous obliger à lui sacrifier nos vies constitue le premier fondement de l’Etat totalitaire. La seule conclusion logique de l’idée selon laquelle l’intérêt général des français serait en contradiction avec celui des allemands c’est que nous devrions, comme l’écrit Daoud Boughezala, « envoyer nos chars Leclerc à Baden-Baden ».

Produire et consommer localement, on a déjà essayé : c’était le moyen âge.

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[1] Ajustée de l’inflation, la production industrielle française (900 milliards d’euros) était 114% plus élevée en 2010 qu’en 1970 et sa valeur ajoutée (215 milliards d’euros) a doublé (source : Insee).
[2] Données des Nations Unies.
[3] Un exemple : payé au Smic, un français de 1972 devait travailler 2 265 heures pour s’offrir une Renault 5 ; aujourd’hui, 1 000 heures suffisent pour acquérir une Twingo
[4] Pour info, 95% de la production de Cognac française est exportée – notamment en Chine (troisième marché mondial) – et cette industrie fait vivre environ 50 000 personnes et leurs familles.
[5] Le plus vieux quartier de Marseille.

Votre mot de passe

On ne va pas épiloguer pendant 150 ans, vous avez besoin : De mots de passe très forts (à partir de 128 bits), un par site (sauf, éventuel...